Jeux d'Histoire du Ponant - club de jeux d'Histoire à Brest

lundi 26 août 2013

Arturus Rex : la pratique et le développement...

A quoi peut donc servir un club de wargame ? A y jouer, évidemment.

Pourtant le JHP essaye d'aller un peu plus loin : l'intention exprimée à sa création est "la pratique, la promotion et le développement des jeux d’histoire et de simulation historique." Nous aimons jouer, et nous avons la chance de pouvoir nous y adonner régulièrement, mais nous sommes également unis par le plaisir de faire partager notre passion au plus grand nombre, particulièrement car le jeu à figurines historiques est mal connu en France.

Habitués aux manifestations publiques à Brest, nous nous sommes cette fois-ci déplacés au Château de Comper en Brocéliande. Les murs de schiste rouge de Concoret sont depuis longtemps habitués aux joutes et spectacles médiévaux qui s'offrent aux spectateurs tout au long de l'été. Mais c'est du fracas de nos armées que les salles du château auront résonné en ce dernier week-end d'août, pour la surprise et le plaisir des visiteurs.



Le fonctionnement d'une association comme la notre s'enrichit d'événements qui pimentent "la routine" de nos soirées de jeu. Nous exposons régulièrement nos champs de batailles dans les réunions de maquettistes ou les salons du jeu. Nous y invitons les passants à tester une petite partie de jeu mais cela reste annexe à la présentation principale.

Au Centre de l'Imaginaire Arthurien nous sommes allés au bout de notre raisonnement : organiser entièrement le déplacement dans le but de faire asseoir les visiteurs à la table et les faire jouer par eux même.
Bien sûr les visiteurs ont été plutôt surpris; nous avions investi la salle audiovisuelle du château, sur le parcours de la visite de l'exposition permanente (démontrant ainsi notre sens aigu de la tactique).
Les visiteurs entrant se sont donc vu proposer un petit aperçu de notre loisir : en quoi consiste le jeu à figurines, une rapide démonstration de la variété des thèmes que l'on sait reproduire (dans notre cas de l'Antiquité au Vietnam, du 6 au 28mm, terrestre, naval et aérien). Puis ensuite l'invitation à s'essayer à la table de la grande bataille Arthurienne avec la règle DBA.

Trois parties par jour, six armées sur la table, des visiteurs repartis avec le plaisir d'une expérience originale, d'autres avec l'envie d'approfondir cet essai en contactant les clubs de leur ville d'origine.

Le plus étonnant pour nous est peut être que les visiteurs, dans leur grande majorité de sympathiques familles dont les attentes et les goûts sont à priori diamétralement opposés à nos loisirs guerriers, s'arrêtent pour nous écouter et s'émerveillent devant nos présentations.

Arturus Rex : la pratique et le développement...

Nous l'apprécions d'autant plus que d'attirer l'attention de promeneurs se dirigeant vers les berges du lac au fond du quel Viviane éduqua Lancelot relève de la gageure : la concurrence est forte, les légendes du lieu semblant nous appeler au son de la mystérieuse harpe éolienne cachée dans la forêt !!

Mais nous avons pour nous la richesse de notre loisir : les batailles n'en sont que la partie la plus visible, mais finalement minoritaire. Il est également facile de présenter l'aspect artistique par la peinture des figurines : le plaisir des yeux devant le déploiement des armées ne saurait être nié. Et l'on aborde alors tout naturellement la découverte de l'Histoire à l'occasion des lectures qui préparent la peinture, et de celles qui précèdent la création des scénarios de batailles. Combien de savoirs ont été échangés dans la chaleur informelle des narrations de nos soirées ? Quel autre loisir offre une approche aussi facile et agréable de la connaissance ?
Et pourtant tout cela s'efface devant l'humanité de la pratique !

Ce sont les facettes de notre loisir : rivalité tactique, apprentissage de l'histoire, développement artistique. Chacun trouve un équilibre entre ses passions pour venir pratiquer le jeu d'Histoire. Puis un jour il se rend compte qu'en plus de cela il partage surtout un instant de camaraderie, tout simple, avec lequel peu de loisirs "modernes" peuvent rivaliser.

De nombreuses heures de peinture de figurines, deux jours de temps libre, 400 kilomètres en voiture et au final un sentiment de plaisir sans tâche. Quel beau et intriguant loisir...
"Le bois des Brumes et ses lutins", fresque murale de la salle audiovisuelle du château de Comper, par Geneviève Gourivaud, d'après et avec l'aimable autorisation de François Bourgeon pour sa BD "Le sortilège du Bois des Brumes"

dimanche 18 août 2013

Arturus Rex (s'approche)

Comme présenté sur l'article précédent (http://jhp29.over-blog.com/arturus-rex) nous nous rendrons donc samedi 24 et dimanche 25 août en grand équipage au Château de Comper en Brocéliande, pour y participer au "Week-end Moyen à Jeux" proposé en ses murs par le Centre de l'Imaginaire Arthurien (que les initiés surnomment "le CIA").

Le CIA propose toute l'année la visite du château et des expositions sur le thème Arthurien. S'y ajoutent l'été des animations spécifiques chaque week-end, comme celui-ci qui regroupe des jeux de société, de rôle, de plateau ou comme nous de jeu d'histoire à figurines proposés au public.

En ce qui nous concerne, nous avons choisi de proposer une bataille "d'initiation" sur le thème Arthurien, ou tout au moins sur le peu que nous savons de ce début des "âges sombres" ; l'empire romain s'est effondré, la province de (Grande) Bretagne s'est repliée sur elle-même et s'est fragmentée en une multitude de faibles royaumes. Les richesses qui y subsistent attirent la convoitise des pillards barbares, et les saxons commencent à déferler sur la grande île (poussant une partie de ses habitants à émigrer en (Petite) Bretagne). Les petits rois anglais s'unissent souvent trop tard pour affronter les envahisseurs et sont vaincus individuellement ("jusqu'à ce que Arthur n'intervienne", bien sûr).
Des saxons!!! Pas vraiment les voisins que l'on rêve d'avoir, mais bon...

Arturus Rex (s'approche)

Notre objectif est de faire jouer les visiteurs, afin de leur faire "toucher du doigt" (au sens propre) notre loisir, c'est pourquoi nous avons choisi une règle de jeu simple et rapide que nous pratiquons fréquemment entre nous : DBA (De Bellis Antiquitatis, "Des batailles Antiques").

Souvent décriée en France précisément pour sa simplicité, elle offre pourtant une bonne représentation (quoique un peu abstraite) des batailles de l'Antiquité et du Moyen Age (avec plusieurs centaines de listes et variantes d'armées, il y en a pour tous les goûts). La règle utilise peu de figurines (40 à 50 environ par armée, sur douze socles), se présente en une dizaine de minute aux néophytes et les batailles se jouent en une heure environ, ce qui est idéal pour un public de passage.

Pour ce projet, nous avons peint 6 armées en 28mm car cette échelle permet un bel aspect visuel et que le projet est d'une taille raisonnable. Nous avons donc trois armées de Bretons (liste DBA II/81 Sub-Roman British) menée par le noble Arthur face aux Saxons honnis (deux fois II/73 Early Anglo-Saxon) et leurs alliés Scots-Irlandais (II/54 Scot-Irish) manipulés bien évidemment par le traître Mordred (une histoire peut-être elle belle sans un bon traître ?).

C'est donc cela que nous avons testé entre nous ce vendredi 17 août avant de faire nos bagages pour les lointaines terres de Brocéliande.
Les armées s'avancent sur le champ de bataille.
Les bretons se déploient. L'avant-garde de soldats professionnels essaye de faire bonne figure, et de cacher le fait que l'essentiel de l'armée est composée de paysans terrorisés.
... mais comment ne pas pâlir devant ces redoutables pillards Scots ?
... particulièrement quand l'artiste qui les a peints est heureux d'avoir réalisé son auto-portrait en figurine au centre de ce socle ? Qui a envie de le contredire ? Des volontaires ?

Nul ne se souvient plus aujourd'hui comment ni ou Arthur, Dux Bellorum de Bretagne, a vaincu les Saxons ! Le fracas des armes et les flots de sang ont jetés sur cette histoire un voile de plusieurs centaines d'années mais aujourd'hui nous sommes rassurés de savoir que le roi en dormition en Avalon reviendra nous protéger quand la Bretagne sera menacée...
Nos figurines sont principalement d'anciennes "Wargames Foundry" et des "Gripping Beast", et nous avons fait un large usage des bannières et décors de boucliers "Little Big Men Studios"

samedi 17 août 2013

ARTURUS REX!

OR OYEZ, OR OYEZ, OR ÔÔÔYEZ!

Il est fait à savoir à tous pourvu qu'ils soient du royaume de Logres que vingt et trois jours après Lugnasad (24 et 25 août 2013) en cette belle saison de récolte et de redistribution des richesses, se tiendra une belle assemblée des plus talentueux belliludistes du Royaume.

Pour le plus grand esbaudissement des gentes Dames, gentils Seigneurs, jouvencelles, jouvenceaux et enfançons, ces belliludistes aux talents sans égal feront monstre de leur appertise dans une joûte amicale dans le respect des lois ancestrales de la Chevalerie, ès castel de Comper en la forêt merveilleuse de Brocéliande (Concoret, 56).



Longue vie au Roy et à la Reine!
Qu'il me soit permis de vous donner céans un avant goût des esbaudissements attendus.

Brandissant Kaledvoulc'h (Excalibur) le Dux Bellorum (Arthur) arbore le bouclier lumineux du juste.

Vils scots et saxons maudits sortent de la forêt où l'ost breton mené par Arthur les attend.

L'ost breton à l'approche du saxon honni.

C'est le choc! Sous les coups des lourdes épées de fer, les casques éclatent, les os craquent et jaillissent les viscères et le sang! (Rassurez vous c'est moins dangereux que le loto ou le foot).

dimanche 11 août 2013

HMS Africaine

Profitons à nouveau du calme des soirées d'été pour rejouer nos scénarios favoris. Une nouvelle fois, quatre joueurs autour de la table. Et cette fois encore, le combat du 13 septembre 1810.
 (illustration empruntée à la BD "H.M.S." de Roussel et Seiter)

L'Africaine est une superbe frégate de 40 canons, dont le destin est hélas typique de celui de nombreux navires français sous l'Empire. Lancée par l'arsenal de Rochefort en 1798, elle sera capturée dès 1801 dans un duel avec la Phoebe, probablement l'un des navires anglais les mieux commandés et les plus efficaces de Méditerranée à cette époque.

Les Anglais ont l'habitude de dire que les meilleurs navires du monde sont de construction française mais armés par leurs équipages. Et l'on doit admettre qu'ils s'activent fort à capturer nos navires pour les remettre en service sous leurs couleurs.

La belle Africaine partagera dès lors la carrière éprouvante des navires de cette orgueilleuse "Royal Navy" qui domine les mers au prix d'efforts inhumains. Les patrouilles en Manche et en Atlantique se succèdent sans répit, quand il ne s'agit pas de service dans l'hiver de la Baltique.

Mais la pire épreuve pour ces équipages ne vient pas des boulets de l'ennemi, ni des tempêtes de l'océan. C'est au printemps 1810 que le capitaine Robert Corbet est nommé commandant sur ce navire.

Les marins britanniques ne sont ni des anges, ni des agneaux. Toujours désespérément à cours de marins, la Navy utilise la "presse" pour peupler ses navires. Il ne s'agit ni plus ni moins que de l'enlèvement légal des "terriens" par les équipages des navires pour servir à bord. Et la discipline de la Navy assure par la suite leur soumission, par la violence. Le capitaine a tous les droits, y compris le fouet ou la mort pour assurer la seule mesure officielle de sa compétence, à savoir le succès de la mission. Les bagnards condamnés à vie ont le choix entre le bagne et l'engagement "libre" dans la Navy, mais il est de notoriété publique que ce choix est simplement imbécile...

Les meilleurs capitaines sont souvent soucieux d'offrir des conditions de vie décentes aux hommes à qui ils demandent tant. Les capitaines les plus typiques sont de bons marins, même si ils peuvent parfois être d'épouvantables tyrans; le capitaine Bligh de la Bounty viens à l'esprit; despote seul maître à bord loin de toute autre autorité.
Mais Robert Corbet est à la fois un monstrueux sadique, un capitaine médiocre et un mauvais marin. Le système aristocratique de l'époque, et une politique de promotion en grade strictement égalitaire puisque basée uniquement sur l'ancienneté permettait à ce genre d'homme de progresser (par exemple, lorsque l'Amirauté anglaise a voulu nommer Nelson amiral, il lui avait fallu promouvoir d'abord les trois capitaines plus anciens que lui dans la liste officielle - mais ils avaient été mis à la retraite d'office le même jour, pour pouvoir attribuer le commandement vacant).
Sa réputation était telle qu'il avait fallu malgré la discipline aveugle de cette marine la menace de la troupe pour que l'équipage de l'Africaine accepte de le laisser prendre le navire. Ils ne serons pas déçus.
L'Africaine est envoyée dans l'Océan Indien avec une grande expédition pour éliminer la menace d'une petite flotille de frégates françaises qui déjoue depuis deux ans toutes les tentatives anglaises dans la région. Pendant le voyage, Corbet terrorise son équipage par la violence, utilisant à loisir la force du détachement de "Royal Marines" du bord. Mais il ne fait pas pratiquer les exercices de manœuvres de combat ni de tir au canon, car il considère que cela entraîne du désordre. Il aime voir son navire irréprochablement propre.

L'Africaine rejoins donc en septembre 1810 la division du commodore Rowley, de la Boadicea, qui pourchasse ses homologues français, fort bien commandés par Duperré et Bouvet et qui viennent de détruire à Grand Port les forces anglaises précédemment envoyées contre eux.
C'est donc lors d'une longue poursuite, le 13 du mois, que l'Africaine, ayant distancée sa division, attaque seule les deux belles frégates Iphigénie et Astrée de la marine de l'Empereur.


HMS Africaine.

Ce combat fait l'objet de l'un des scénarios du jeu "Close Action" de Mark Campbell (chez Clash of Arms). Cette règle de jeu est un perfectionnement de la mythique "Wooden Ship & iron Men", toujours sur le thème du combat naval "fin de la Royauté et Empire".

Elle propose d'utiliser des pions cartonnés sur une carte à hexagone. Ces hexagones peuvent accueillir des modèles au 1:2400 au lieu des pions pour améliorer le rendu visuel des parties.

Pour chaque tour de jeu, chaque capitaine de navire écrit ses décisions de manœuvres en essayant de deviner ce que vont faire les autres navires dans le même temps pour finir dans la meilleure position envisageable. Les règles définissent les capacités d'évolution des navires suivant la force et l'angle du vent.

Le jeu est somme toute relativement simple une fois admise la façon dont un voilier évolue au vent, en particulier ces grands navires "à voiles carrées". On le qualifie de "technique" car une bonne part de la performance en jeu viens de la meilleure utilisation possible des caractéristiques des navires.
Mais pour encore plus de plaisir visuel, beaucoup se tournent vers les merveilleux modèles au 1:1200 de Rod Langton (http://www.rodlangton.com/), sur des hexagones plus grands. Là le plaisir du modélisme s'ajoute véritablement à celui du jeu (sur des navires dont la coque fait habituellement moins de 5 cm de long).

USS Essex, frégate de 32 carronades, modèle Langton 1:1200

Le scénario est simple, la frégate Africaine possède l'avantage du vent contre les deux frégates françaises qui lui font face .Son chef sur la Boadicea est encore loin et mettra bien du temps à le rejoindre.

Contrairement aux Français qui ne peuvent que progresser lentement en remontant au vent, Corbet a le choix ; il peux soit se jeter sur les Français, soit gagner du temps, remettre le cap vers son chef en espérant que les Français le suivent. Là les chances s'égalisent bien.

Le second choix donne des parties assez longues mais pleines de suspense, Corbet essayant d'amoindrir ses poursuivants sans être rejoins par eux.

Historiquement, Corbet est parti directement au combat, seul, avec un équipage non entraîné contre deux des meilleurs navires de la flotte française. Un véritable tyran ne saurait s'embarrasser de détails insignifiants ! C'est bien évidemment idiot, mais c'est ce que nous avons décidé de tenter, "pour changer un peu". Par bonté, la distance de la Boadicea a été réduite, lui permettant d'entrer dans la partie "moins tard" et de jouer un rôle tardif.

L'Africaine passe derrière la poupe de l'Iphigénie. La bordée en enfilade va faire très mal...

Notre combat a été rude, l'Africaine manœuvrant agressivement entre les deux Français, les désorganisant et surtout infligeant autant de dommages que ce qu'elle reçoit, ce qui n'est pas une mince affaire dans un engagement à deux contre un !!

Et pourtant, cette valeur ne sera pas récompensée. Alors que l'Africaine s'épuise, ses adversaires s'étant quelque peu répartis ses bordées de canons quand elle concentrait toute leur attention, la Boadicea juge mal de sa vitesse, traverse le combat et... s'éloigne hors de portée. Est-ce par empressement de rapporter à l'Amirauté le courage de Corbet ???? Une fois encore les souffrances de l'équipage de l'Africaine seront donc bien mal payées !


En 1810, le combat fut décousu. Il semble que l'équipage anglais ait très mollement combattu (et même refusé d'employer les canons) sous les ordres de Corbet, préférant la défaite à leur existence sous ses ordres (la règle Close Action donne à l'Africaine une valeur de compétence et de moral de "D-4" pour ce combat, ce qui est vraiment faible et tout à fait inhabituel pour un Britannique).

Mais peu après le début de la bataille un boulet français emporte le pied de Corbet, qui est amené à l'infirmerie. L'équipage s'unit immédiatement sous les ordres du premier lieutenant, et reprends (ou prends, simplement) le combat, qui va durer 2 heures. Mais la volonté ne peut pas tout, et lorsque la Boadicea approche, l'Africaine est déjà capturée. La raison impose alors un repli anglais.

HMS Africaine.Les Français abandonnerons pourtant l'Africaine pendant la nuit. Ses mats sont détruits, sa coque est très abîmée et ils savent qu'ils n'ont pas de chantier naval capable de la réparer. Elle portera donc ses marins en attendant que les Anglais ne les récupèrent (comme d'habitude dans ces batailles, toutes les barques ou canots ont été détruits pendant le combat et les Français ne pouvaient pas prendre autant de prisonniers à leur bord ; l'humanité a donc dictée leur décision).

Corbet est mort de ses blessures. Certains disent qu'il s'est suicidé suite à son échec, d'autres que ses marins l'ont tués profitant du désordre. En tous cas, l'Amirauté n'a pas fait cas de sa perte



Cette courte bataille et la vie à bord de l'Africaine sont aussi évoqués dans le scénario du roman historique "Expédition à l'île Maurice" ("the Mauritius Command") de la série "Jack Aubrey" par Patrick O'Brian. Conformément à la pratique dans ce genre de romans, le héros de la série est simplement substitué à un personnage historique et reçoit donc les mérites d'actions largement historiques ou légèrement arrangées).

dimanche 4 août 2013

Peugeot, Jules, André.


Pour une séance de jeu d'histoire un vendredi 2 août, comment ne pas prendre prétexte de ce petit matin, il y a 99 ans...

C'est donc au petit matin le 2 août 1914, alors que le café réchauffe les quarts de fer blanc du poste de garde du 44° Régiment d'Infanterie dans la ferme à l'entrée du bourg de Joncheray, que la petite fille du fermier entre dans la cours en criant : les Allemands ! ils arrivent !

L'Europe est en paix en ce matin ensoleillé, mais elle est déjà en armes. Depuis l'attentat de Sarajevo, le jeu pervers des alliances internationales n'a servi que de prétexte aux ambitions des gouvernements. Les Allemands aspirent à parfaire leur victoire éclatante de 1871, les Français brûlent de venger leur honneur, de reprendre les territoires confisqués d'Alsace et de Lorraine, de montrer qu'ils ne sont second de personne en Europe.


C'est la toute première guerre "nationale" qui se profile. Pour la première fois, des deux côtés de la frontière, c'est l'ensemble des citoyens conscrits qui portent les armes et non plus seulement des professionnels. Ce n'est pas qu'ils désirent la guerre, ni même que l'évocation des grandes idées de nation, de liberté ou d'honneur ne leur inspire plus qu'un haussement d’épaule dédaigneux. Mais de part et d'autre du Rhin, personne n'accepte l'idée de céder à "ceux d'en face". 40 ans d'éducation publique ont bien joué leur rôle pour souder le pays, aucun n'accepte l'idée d'être soumis à ces voisins hostiles, à ces brutes sanguinaires. Ils n'ont pas peur, et si "les salauds d'en face" veulent la guerre, ils l'aurons. Nous serons à Berlin en trois semaines, déjà partout en France les trains de mobilisation acheminent les troupes vers la frontière.

Mais quand même, la petite paysanne de Belfort ne connait les Allemands qu'au travers des images d’Épinal, ne s'est-elle pas trompée ?

Le chef du détachement français, le jeune instituteur Peugeot, caporal rappelé sous les drapeaux il y a quelques jours, sort de l'écurie, cours vers le chemin, et tombe nez-à-nez avec un très jeune officier allemand, de Mulhouse, nommé Camille Mayer. Celui-ci a été envoyé en reconnaissance de l'autre côté de la frontière car ses chefs ignorent les positions exactes de l'armée française mais se doutent qu'ils recevront bientôt des ordres qui changeront le cours de l'histoire.

Sans parler, Mayer dégaine son revolver, tire et blesse Peugeot qui riposte. Puis les deux hommes tombent dans la poussière du chemin, blessés, mourants.

Les Allemands s'élancent, mais les Français se sont ressaisis. Un échange de tirs, et les "boches" refluent. Comment cela c'est-il passé ? Nous sommes en paix !

L’Allemagne ne donnera ni explications, ni excuses.

48 heures plus tard, elle déclare la guerre à la France et à ses alliés.



Peugeot, Jules, André.

Cet accrochage, 48 heures avant la déclaration de guerre, est notre scénario d'introduction "typique" au jeu d'escarmouche. Ici pas de grande stratégie impliquant des armées entières sur la surface du globe. Chaque figurine représente un seul combattant, et le jeu détermine ses réactions "au plus près" du combat.

Les règles habituellement utilisées au JHP pour ces escarmouches sont les variantes du système "Chain Reaction" de "2 Hour Wargames", et ici plus précisément la première édition de "Nuts!", son incarnation "guerres modernes".

Si elles peuvent frustrer des joueurs soucieux de contrôle et de tactique fine, elles sont à la fois simples, rapides et sans équivalent pour représenter l'incertitude des réactions humaines face au danger. Si le joueur contrôle parfaitement le chef d'un groupe, les combattants qui le composent peuvent très bien juger plus prudent de rester à l'abri d'un mur que de tenter de devenir des héros...

La mise en situation du scénario est des plus simples : les bâtiments de ferme le long du chemin, les petits champs cloisonnés de talus, la haie d'arbres qui dissimule l'arrivée des Allemands (en haut à droite de la photo).

Historiquement, le combat a été une surprise pour les deux camps. Je n'ai donc pas indiqué les objectifs de victoire aux participants, à eux de se faire une idée suivant la situation.
Pour les Français c'est assez évident, ils défendent leur terre. Ils doivent donc soit détruire le détachement ennemi (plus facile à dire qu'à faire) soit les repousser avec suffisamment de pertes pour leur faire comprendre qui reste le maître ici.

Pour les Allemands la situation est plus floue. Ils sont en reconnaissance pour localiser les avant-postes français. Si Mayer reste en vie, il doit infliger des pertes supérieures aux Français avant de se retirer (il semblait brûlant d'envie d'en découdre). S'il tombe, ses hommes doivent si possible récupérer son corps ou au minimum infliger des pertes équivalentes aux français avant de se replier pour apporter leurs informations.

Dans tous les cas, les Allemands doivent faire vite. Même si les participants n'en sont pas informés, le sergent commandant le poste de garde suivant à l'entrée de Joncheray a pris l'initiative de rejoindre l'escouade de Peugeot dès les premiers tirs, et arrivera entre 8 et 15 minutes après le début des combats, rendant la situation des Allemands difficilement tenable.
(bon, toutes mes excuses, j'ai été fidèle à moi-même et ai oublié de prendre des photos quasiment jusqu'à la fin de la partie...)

La partie commence par l'échange de coups de feu, simultané, entre Peugeot et Mayer. Ici Peugeot est tué sur le coup, Mayer blessé s'effondre inconscient.

Les Français s'élancent hors de l'écurie, les Allemands se scindent en deux groupes : l'un progresse rapidement le long du chemin pour atteindre le corps de son chef, l'autre contourne le corps de ferme pour prendre les français à revers.

Mais si les Allemands du chemin progressent vite et fort, tuant plusieurs Français, leur second groupe est bloqué par quelques Français à l'arrière de la ferme, et n'ose pas attaquer. Cela donne le temps aux Français de basculer vers le groupe du chemin, parvenu au corps de son chef, de les clouer sur place puis de les éliminer les uns après les autres.
Le second groupe allemand tente alors de rejoindre ses camarades mais il est trop tard ; trois soldats sont morts ou blessés, l'un a fuit, seul un d'entre eux s'est réfugié derrière une haie et bloque de fait la progression des français.

Ceux-ci ne s'en laissent pas compter, et trois "pioupious" donnent l'assaut du "casque à pointe" plutôt terrorisé et le prennent prisonnier alors que leurs camarades, par leurs tirs de couvertures, renvoient les derniers allemands en désordre dans les bois à l'est, d'autant qu'une escouade française de secours débouche venant du village.
Une victoire française, donc.

Comme souvent, notre bataille est plus "sanglante" que ne l'a été l'épisode historique (cinq morts ou blessés graves de chaque coté, un allemand prisonnier) ; nous ne risquons pas nos vies donc nous pouvons être plus agressifs qu'en réalité, d'autant que les règles de jeu sont toujours prévues pour donner "du spectacle". Historiquement il y eut un mort français (Peugeot) et deux allemands (Mayer et un soldat blessé et retrouvé plus tard) ainsi qu'un autre Allemand, retrouvé blessé et capturé lors de la poursuite ultérieure par l'armée française.

Le tout en une courte session de jeu de deux heures pour quatre joueurs, l'idéal pour remplir une soirée d'été au calme pour les quelques membres qui ne sont pas partis profiter de leurs congés en famille.

jeudi 1 août 2013

Ouverture du blog


Que la date du 1er août soit désormais reconnue comme étant celle de l'anniversaire de la création du blog du JHP.
Joie.